Historique de Corneilla de Conflent

Bâtie sur un mamelon au cœur de la vallée du Cady entre Villefranche de Conflent et Vernet Les-Bains; Corneilla de Conflent, ancienne résidence des Comtes de Cerdagne et du Conflent se dresse face à l’imposant Canigou. Située à 40 km des champs de neige et à 50 km de la Méditerranée; Corneilla de Conflent s’élève entre 550 et 600 M d’altitude.

A l’abri des forts vents dominants, Corneilla de Conflent bénéficie d’un microclimat. L’origine du nom de Corneilla est une villa romaine Corneliani. Début du XIème siècle, en l’an 1018 les textes font référence à la basilique de Corneilla où le comte de Cerdagne et du Conflent construisit son palais. Son fils, fondateur de l’Abbaye de St Martin de Canigou, en fit sa résidence donnant ainsi à Corneilla le titre de Capitale de Cerdagne et de Conflent. En 1025, le comte obtint de l’êveque d’Elne le patronat de l’église.

En 1097, son fils le comte Guillaume Jorda installe à Corneilla une communauté religieuse composée de douze chanoines obéissant à la règle de Saint Augustin. Aucun document ne fait état du village avant l’an 901, on peut imaginer qu’il fut emporté par les crues de l’an 878 et reconstruit sur le versant ouest de la rivière de Fillols là où nous le connaissons. A l’ouest du village, dans un nid de verdure apparaît le Château de Saint Clément ancienne propriété du peintre Georges Daniel de Monfred, contemporain et ami de Gauguin et père du célèbre aventurier Henri de Monfreid.

D’autres sites remarquables composent la richesse patrimoniale de Corneilla. Hors du village, sur le domaine des Ambouillas, les randonneurs peuvent découvrir de vieux vestiges comme : l’Orris (architecture romane avec voûte en encorbellement unique, un des trois plus grands du département) et la Redoute (une ancienne garnison avec chemin de ronde).

En outre ce plateau donne la possibilité d’admirer un panorama sur les deux vallées de la têt et du cady mais aussi, nous offre une vue plombant sur la cité médiévale de Villefranche de Conflent, son château fort libéria et le réseau canalette.

Les Ambouillas sont donc un lieu de grands intérêts culturels et naturels, un lieu de visites complémentaires au village et son église.

Le sous-sol de Corneilla renferme des gisements de pyrite, riches en minerai de fer, qui ont été exploités pendant longtemps. Sur la colline ouest on trouve les vestiges des fours à griller le minerai, une cheminée y est encore visible. Ont été exploitées également les carrières de marbre rose, de talc et de manganèse. Toutes ces richesses du siècle dernier sont aujourd’hui à l’abandon. Des années durant, elles ont permis avec l’arboriculture (pommes, poires) et l’élevage de faire vivre les nombreuses familles au village qui comptait plus de 600 habitants.

George-Daniel de Monfreid (1856-1929)

George-Daniel de Monfreid est le père de l’écrivain aventurier Henry de Monfreid. Assez méconnu du grand public, il était l’ami et le confident de Gauguin mais aussi de grands artistes tel que Maillol, Terrus, Violet … Artiste peintre, il a été un des acteurs des grands mouvements artistiques à la fin du XIX -ème siècle. Sans problèmes d’argents, il ne cherchait pas à vendre ses œuvres, il peignait pour lui et ses amis, ce qui ne l’empêchait pas de participer à de grandes expositions. Il avait d’autres talents mais nous en reparlerons plus loin. N’étant pas spécialiste de la peinture, j’ai préféré reproduire un article écrit en 1961 par un artiste de la région du Conflent (Pyrénées-Orientales).

LE PEINTRE DE SAINT-CLEMENT

 Depuis le Romantisme, l’histoire de la peinture cônnait ses heures les plus fécondes et aussi les plus émouvantes.

 Parallèlement aux grands mouvements soiologique où l’homme tente de se libérer des forces qui l’oppressent et, bien souvent, l’exploitent, l’artiste-peintre poursuit son propre combat pour se soustraire à la tyrannie des écoles officielles. Il affirme son droit à la liberté, en ce qui concerne sa conception de l’oeuvre d’art et du choix des moyens qui lui permettent d’atteindre le but recherché.Abandonné pas son ancienne clientèle qui n’apprécie pas sa nouvelle manière, il recherche l’approbatin du critique et du collectionneur sensible à son talent.

Trop dissemblable d’origine, de tempérament, de formation et de goûts pour rester groupés dans une même école, ils reprennent vite leur indépendance. Leur union, si nécessaire pour faire triompher leur idéal, était désormais inutile.

Certains, comme Manet, pousseront l’impressionisme jusqu’à ses limites, d’autres, à la personnalité plus ardente, chercheront de nouveaux moyens d’expression et c’est de l’oeuvre de ceux-ci que découleront toutes les écoles modernes. Ces peintres ont pour nom : Van Gogh, Cézanne et Gauguin, qui fut l’ami de Daniel de Monfreid.

George-Daniel de Monfreid avait sept ans en 1863 lorsque sa mère fit l’acquisition d’une modeste ferme sise dans la vallée du Cady à quelques minutes de Corneilla-de-Conflent. De rapides transformations en firent le domaine Saint-Clément que nous connaissons aujourd’hui.

C’est dans cette vaste demeure que l’enfant vécut quelques années avant de poursuivre ses études à Genève et dans différentes villes du midi de la France .Le site enchanteur face au majestueux Canigou, le climat trés doux, les vertes frondaisons où il aimait jouer, il ne les oublira jamais, et il y revint fréquemment pour de longs séjours avant de s’y fixer définitivement.

Attiré depuis son plus jeune âge par le dessin, il rejoignit Paris sitôt ses études terminées, et fréquenta l’AcadémieJulian. Mais une autre passion partageait son coeur, la passion de la mer. Aussi délaissait-il souvent les aeliers de peinture pour naviguer à bord de son petit yacht le long des côtes d’Espagne. C’est avec lui que son fils Henry qui allait devenir le célèbre écrivain de l’avaenture maritime, accomplit, à peine âgé de trois ans, sa première traversée vers les terres d’Afrique.

Mais un évènement extraordinaire allait influencer toute sa vie future. ce fut sa rencontre avec Gauguin. Une page de son carnet de note retrace cette première entrvue chez Schuffenecker : « Je rencontrais cette étrange figure d’artiste, qui d’abord me fut peu sympathique000Ses oeuvres furent pour moi une révélation je compris ce que Gauguin cherchait, et , même du coup, je ressentis la fausseté de tout ce qu’on m’avait appris sur l’art. Les propos qui m’avaient semblé des paradoxes devèrent des préceptes que je trouvais alors d’une simplicité toute évidente. »

Comme on le voit, Monfreid fut impressionné par la personnalité du peintre de Tahiti, et il en épousera toutes les théories sur l’esthétique.

On aurait pu craindre que la grande admiration qu’il lui portait ne fût néfaste à l’épanouissement de son propre talent, et qu’il pût en naître un complexe d’infériorité. D’autre part, il ne devait pas être facile d’être l’ami et le confident d’un homme tel que Gauguin, absolu dans ses théories, fantasque dans ses décisions, souvent incompris des ses rares amis.

Ses séjours dans la capitale au moment où s’affirmait les impressionnistes firent de lui un adepte de cette technique. Mais si cette vision de la nature est possible dans l’Ile de France, elle ne l’est plus sitôt que l’on retrouve les paysages du Conflent. Et, nous l’avons dit, Monfreid faisait de longs séjours à Saint-Clément pour y peindre. Ici nul brouillard ne vient dissocier le rayon lumineux. C’est le domaine de la couleur pure, des plans nettement délimités, d’un horizon restreint. Le ciel y est limpide, le contraste violent

Ces caractères agissent peut-être inconsciemment sur l’artiste. L’exemple le plus frappant est celui des cubistes. Dans leur première manière dite analytique, sous le ciel sombre de Paris, ils n’utilisent que des gris. Par contre sous le ciel lumineux de Céret ils emploient à nouveau la couleur, dans une deuxième manière qui sera synthétique. Monfreid subit aussi cette influence durant ses longs séjours au pied du Canigou, et modifie sa manière impressionniste. tout comme Cézanne sous le ciel de Provence, il appuie davantage sur la composition et sur la délimitation des plans colorés. Sa peinture y gagne en puissance bien qu’il s’en dégage toujours une impression de sérénité et de poésie.

Malgré la grande fascination que l’œuvre de Gauguin exerçait sur Monfreid, elle n’influença que très peu sa manière. Tout au plus, dans quelques natures mortes, il porta l’accent sur le caractère décoratif du sujet, en faisant jouer, admirablement il est vrai, les arabesques d’un vase de fleurs, avec la ligne baroque d’un motif de tapisserie. Comme son célèbre ami, il utilisait la touche oblique et traitait pareillement les fonds.

Dans ses bois par contre, il serra parfois de très prés la manière de Gauguin, et ceux qu’il grava pour illustrer les cahiers de Noa-Noa pourraient être signés par l’auteur du texte.

A partir de 1900, Monfreid fait des séjours de plus en plus longs dans le Conflent, Il partage son temps entre la peinture, les amis, et aussi la défense des intérêts de Gauguin qui vient de mourir dans son île lointaine.

Héritier de ses œuvres qu’il a en dépôt chez lui, il les remet à Madame Gauguin qui fera plus tard un long séjour à Saint-Clément.

Que dire des amis qui fréquentèrent l’atelier ou le ménage de Monfreid ? Ils furent si nombreux ceux qui firent appel à son amitié e bien souvent à sa bourse !

L’ami de toujours fut Maillol, le grand Maillol qui cherchera sa voie pendant plus de vingt ans à travers la peinture, la tapisserie et enfin la sculpture.

A Paris, Monfreid fréquenta Monfort, Charles Morice, Lafarge, Ségalen et même Verlaine. Il était très lié avec le peintre Schuffenecker, rendu célèbre par le tableau que Gauguin fit de sa famille.

A Saint-Clément ce fut surtout le peintre Louis Bausil qui fut son ami intime. Déodat de Sévérac, mobilisé à Prades en 1914, vint plus tard se joindre au groupes. Gustave Violet, au talent désintéressé, était souvent à Saint-Clément.

George-Daniel de Monfreid mourut en 1929, victime d’un accident stupide. Dix ans après, la galerie Charpenter consacrait son talent par une belle exposition où figuraient une centaine de ses œuvres. Dans un angle de la galerie était reconstitué l’atelier du peintre, où par modestie Monfreid dissimulait ses toiles derrière des tapisseries pour ne laisser apercevoir que celles de Gauguin.